CE QUE DIT LA LOI : Obligations et sanctions

Comment les risques psycho-sociaux sont-ils encadrés ?

Une obligation générale de sécurité incombe à l’employeur (article LP. 4121-1 du Code du travail). Il lui revient d’évaluer les risques, y compris psychosociaux, et de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale de ses salariés. Code du travail Article LP. 4121-2 4° Adapter le travail à l’homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production, en vue notamment de limiter le travail monotone et le travail cadencé et de réduire les effets de ceux-ci sur la santé (…) Code du travail Article Lp. 1121-1 Pour l’offre d’emploi, le recrutement et la relation au travail, ne peuvent être pris en considération l’origine, le sexe, les moeurs, l’orientation ou l’identité sexuelle, l’âge, la situation de famille ou la grossesse, les caractéristiques génétiques, l’appartenance ou la non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, les opinions politiques, les activités syndicales ou mutualistes, les convictions religieuses, l’apparence physique, le nom de famille, l’état de santé ou le handicap.

Le Code du travail (article L 4121-1) oblige l’employeur à prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale de ses salariés. L’employeur ne doit pas seulement diminuer le risque, mais il doit l’empêcher. L’employeur a donc une obligation de résultat.
Le Code civil va encore plus loin puisqu’il intègre dans l’obligation de l’employeur de prendre toutes les mesures appropriées à la nature du travail, en vue de protéger la santé, la sécurité et la dignité du salarié (article 2807 du CC).
Les mesures en question comprennent :
– Des actions de prévention des risques professionnels
– Des actions d’information et de prévention
– La mise en place d’une organisation et de moyens adaptés
Ces mesures doivent être entendues comme toujours « provisoires », dans ce sens que l’employeur doit continuellement les faire évoluer pour les améliorer ; devra prouver, dès que de besoin, qu’il a travaillé à les faire évoluer (bilans, réunions …)
Ces mesures doivent être mises en oeuvre en respectant 9 principes de prévention (article L 4121-2 du Code du travail) :
– Eviter les risques
– Evaluer les risques qui ne peuvent pas être évités
– Combattre les risques à la source
– Adapter le travail à l’homme
(conception des postes, choix des équipements de travail, choix des méthodes de travail et de production) en vue de limiter le travail monotone ou cadencé et réduire les effets de la monotonie ou de la cadence sur la santé)
– Tenir compte de l’état d’évolution et de la technique
– Remplacer ce qui est dangereux par ce qui n’est pas dangereux ou par ce qui l’est moins
– Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l’organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l’influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral et au harcèlement sexuel, ainsi que ceux liés aux agissements sexistes
– Prendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle
– Donner des instructions appropriées aux travailleurs
Dans cette matière, un directeur, un responsable ou toute personne disposant d’une délégation de pouvoir en matière de sécurité est tenue par ces obligations, ce qui signifie que l’employeur doit alerter ses cadres sur le fait qu’ils sont les acteurs quotidiens de la protection des salariés ; l’employeur devra prouver qu’il a sensibilisé ses cadres sur ces questions.
Cette obligation est donc une obligation en continue, et la preuve pèse toujours sur l’employeur, même si la violation de cette obligation est le fait de l’un de ses préposés. Et il appartient à l’employeur dont le salarié, victime d’un accident du travail, invoque une inobservation des règles de prévention et de sécurité, de démontrer que la survenance de cet accident est étrangère à tout manquement à son obligation de sécurité.
Si l’employeur justifie avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L 4121-1 et L 4121-2 du Code du travail, il n’est alors pas sanctionnable.
Bien entendu, tout salarié de l’entreprise a l’obligation de prendre soin de sa propre santé et sécurité et de celle des autres salariés pouvant être concernés par ses actes ou manquements. Il doit respecter les instructions données par l’employeur en matière d’hygiène et de sécurité (Article L. 4122-1 du Code du travail).
L’employeur pourrait « en principe » se dédouaner de sa responsabilité s’il démontre que le salarié a violé ses propres obligations, et que le salarié avait été alerté sur ces obligations.
Deux exemples concrets d’obligations de l’employeur :
– Si l’entreprise a un projet qui est source d’inquiétude pour les salariés : il doit mettre en place un dispositif efficace pour accompagner les salariés afin d’éviter les risques psychosociaux
– En cas d’altercation entre deux salariés, l’employeur doit prendre des mesures contre les répercussions immédiates causées sur la santé du salarié en envisageant tout risque de survenue d’un nouvel incident, et le fait même que cette altercation soit survenue entraîne la responsabilité de l’employeur qui aurait dû prendre toute mesure pour l’éviter.
Toutes les mesures prises par l’employeur pour prévenir les risques pour la santé et la sécurité doivent être mentionnées dans le document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP) qui est obligatoire dans toutes les entreprises sans exception.

Quels sont les risques encourus en cas d’absence d’évaluation des risques psychosociaux ?
Le fait de :
– Ne pas procéder à l’évaluation des risques psychosociaux ;
– Ne pas la transcrire dans le document unique d’évaluation des risques ;
– Ne pas mettre à jour ce document,
Constitue une infraction

– Des amendes
L’absence de Document Unique lors d’un contrôle de l’inspection du travail est puni d’une amende de 1 500 € pour l’autoentrepreneur (personne physique) et 7 500 € pour une société. La violation de l’obligation de mettre le Document Unique à disposition du personnel constitue un délit d’entrave. Ce délit est puni d’un an d’emprisonnement et de 3 750 € d’amende.
Enfin, le fait de ne pas présenter le Document Unique à l’inspection du travail est passible de sanctions pénales. La sanction est différente selon l’agissement de l’employeur (intentionnel ou non).
Il existe également le risque d’usage du droit de retrait des salariés qui peut entraîner dans certains cas la fermeture de l’entreprise jusqu’à la prise de mesures de protection adéquates. Le manquement à cette obligation peut donner lieu au versement de dommages-intérêts, si les salariés en font la demande. L’amende s’élève alors au minimum à 450 € multiplié par le nombre de salariés.
– La condamnation de l’employeur en cas de « faute inexcusable » : un vrai risque financier couteux pour la société, mais aussi pour l’employeur lui-même. En cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle, le salarié ou ses ayants droit peuvent mettre en avant l’existence d’une faute inexcusable de l’employeur.
Qu’est-ce que la faute inexcusable ?
« lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié, et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver », il est jugé que l’accident ou la maladie professionnelle du salarié est dû à une «faute inexcusable de l’employeur». Le critère à retenir pour savoir s’il y a ou non « faute inexcusable » de l’employeur, c’est la conscience du danger par l’employeur, ainsi que l’absence de mesure pour préserver le salarié.
Les contrôles de l’Inspection du travail sont fréquents suite à un accident de travail d’un salarié.
Dans un premier temps, le juge saisi demandera à voir le DUER, et la mauvaise rédaction du document unique (si des risques ont été oubliés par exemple) suffit à elle seule à entraîner la reconnaissance d’une « faute inexcusable » de l’employeur.
L’inspection du travail n’hésite pas à effectuer des contrôles quelques semaines après l’accident pour vérifier que des mesures ont bien été prises pour améliorer les choses. La « faute inexcusable » de l’employeur correspond au manquement de ce dernier à son obligation de sécurité révélé par un accident du travail ou une maladie professionnelle. La reconnaissance de la « faute inexcusable » peut résulter, soit :
– D’un accord amiable entre le salarié victime et son employeur ;
– D’une décision du tribunal judiciaire.
Une fois que la faute inexcusable est juridiquement reconnue, la victime peut prétendre à une majoration de sa rente ainsi qu’une réparation de ses préjudicies, ce qui représente un véritable coût pour l’employeur.
Coût financier de la « faute inexcusable »
La société peut être condamnée à verser au salarié une rente (ou un capital), et risque par ailleurs une amende pouvant aller jusqu’à 225 000 euros.
L’employeur pourra en outre être personnellement condamné à des dommages et intérêts, et il risque par ailleurs une amende pouvant aller jusqu’à 45 000 euros et une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à 3 ans.
Exemple de condamnation de la société
Une décision rendue en 2011 par le Tribunal avait estimé qu’une société de gardiennage avait commis une faute inexcusable vis-à-vis d’un agent qui avait subi de graves morsures d’un chien qui appartenait à l’un de ses sous-traitants.
Le tribunal a motivé cette décision en considérant que la société « devait préciser les conditions d’intervention de ses propres agents et de la société à laquelle elle avait recours pour limiter les risques d’accident. Elle aurait dû lui fournir des formations, des instructions précises, des mises en garde ou des conseils pour limiter tout risque d’accident avec les chiens déployés sur le site sous son contrôle. La société de sécurité ne pouvait ignorer la dangerosité d’un chien de ce type. »
La garantie faute inexcusable est intervenue pour couvrir les différents postes de préjudices retenus (souffrances physiques et morales, préjudice esthétique temporaire et permanent, préjudice patrimonial permanent, assistance d’une tierce personne). Cette garantie a pris en charge les conséquences financières de ce litige (près de 40 000 euros).

Les textes

Une obligation générale de sécurité incombe à l’employeur (article LP. 4121-1 du Code du travail).

Les obligations

Le Code du travail (article L 4121-1) oblige l’employeur à prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale de ses salariés.

Les sanctions

La condamnation de l’employeur en cas de « faute inexcusable » : un vrai risque financier couteux pour la société, mais aussi pour l’employeur lui-même.

LOI SANTÉ AU TRAVAIL – ce qui vous attend depuis le 1er avril 2022

La loi n°2021-1018 santé au travail du 2 août 2021, a été publiée au Journal officiel et, c’est depuis le vendredi 1er avril 2022 qu’elle entre progressivement en application avec la sortie des premiers décrets. Avant de faire un point sur les nouvelles mesures applicables, rappelons ses deux principaux objectifs :
* le renforcement de la prévention au sein des entreprises ;
* le décloisonnement de la santé publique et la santé au travail.
La prévention collective
* Le Document Unique d’Évaluation des Risques Professionnels (DUERP) : ce document unique, comprenant obligatoirement les risques ainsi que les actions concrètes de prévention et de protection, devra faire l’objet d’un dépôt dématérialisé sur un portail qui garantira la conservation ainsi que la confidentialité des données transmises à l’aide notamment, d’un accès restreint. La totalité de ses versions antérieures devront être conservées par l’employeur et seront accessibles par les employés, anciens employés ainsi que par toute personne ou instance pouvant avoir un intérêt à y accéder ; et ce, pendant une durée d’au moins 40 ans.
* La formation des représentants du personnel : la formation santé/sécurité des membres de la délégation du personnel du CSE sera renforcée. Les représentants du personnel devront désormais être formés à la santé au travail. Cinq jours minimum de formation sont prévus à la suite d’un premier mandat. En cas de renouvellement, la durée peut alors être réduite à trois jours. Exception faite pour les membres du CSSCT (Commission Santé, Sécurité et Conditions de Travail) pour qui, les cinq jours de formation restent obligatoires.